mercredi 7 avril 2010

l'Islam est il une religion de charite ? ( par Lamine Sylla )

Toutes les religions révélées ont ceci de commun qu’elles se proclament d’amour. La vie de la communauté y est censée être réglée autour des lieux de culte dont les gérants ont en charge d’appliquer ou de faire appliquer les percepts moraux codifiés par ladite religion... Dont l’un des plus célèbres est la notion de charité. Toutes les écritures saintes recommandent aux âmes d’être charitables en même temps qu’elles leur demandent de s’entraider. Mais il ne s’agit pas de confondre charité et solidarité.
La solidarité, on peut le dire, est un caractère inné chez tout être vivant en groupe. Il peut revêtir plusieurs formes et s’exprimer par divers canaux mais il reste en définitive une manifestation de l’instinct de conservation d’une espèce donnée ou de préservation d’un objet ou d’une fonction, donc un mouvement rationnel. Tandis que la charité est plutôt une vertu théologale au même titre que la foi et l’espérance. C’est en ce sens qu’il est superflu de lui chercher un qualificatif dès lors qu’il n’a pour objet que le Créateur Souverain. En effet, elle est singulière en tant qu’elle est obéissance de la part de l’homme au commandement de son Maître qui lui enjoint d’aimer son prochain et donc ne met en jeu que l’homme et son Dieu dans l’intimité de la foi. C’est, comme qui dirait, qu’elle est venue pour faire avec le bois tordu de l’humanité quelque chose de droit, n’est ce pas Kant ?
Plus prosaïquement, si les animaux peuvent manifester de la solidarité entre eux devant un prédateur quelconque, les hommes se solidarisent aussi pour une cause. De même, il est impropre de parler de charité concernant les animaux ou des hommes ne professant aucune religion.
La charité est donc, comme on le voit, consubstantielle á la religion. En islam la charité est symbolisée au plus haut point par la zakat. Elle y est un des piliers de la foi et son acquittement est obligatoire pour toute personne disposant d’un capital. Il est regrettable, cependant, que cette contrainte morale ne soit pas adoubée d’une institution qui aurait en charge sa collecte et sa distribution. Cette lacune explique sans doute la relative discrétion de la charité musulmane au Sénégal oű pourtant non seulement l’islam est la toute première religion mais encore l’essentiel du pouvoir économique y est détenu par les musulmans. En même temps, ce constat nous conduit á nous interroger non pas si la religion musulmane est charitable, la réponse est évidente parce que la charité est la marque déposée de toute religion au demeurant, mais bien plutôt si les musulmans sénégalais sont charitables. Si oui, quelles sont les destinations privilégiées de cette charité distribuée par les riches musulmans sénégalais ?
Très difficile, en tout état de cause, d’en cerner les contours tant il est pratiquement impossible de trouver une importante réalisation de la part d’un riche musulman sénégalais. Et pour cause l’essentiel est absorbé par la construction de lieux de culte ou maisons d’éducation coranique si ce n’est par des dépenses de prestige personnel nonobstant l’existence de réalisations concrètes de personnalités qui peuvent être considérés comme des icônes dans ce domaine notamment Feu Ndiouga Kebe, feu Djily Mbaye et Aliou Sow, le magnat des travaux publics.
Si non, ce ne sont pas les opportunités qui manquent eu égard aux conditions de vie précaires de l’écrasante majorité de la population sénégalaise. En effet, en parcourant l’intérieur du Sénégal, au centre notamment, il est triste de constater combien la corvée d’eau reste encore pénible du fait de l’éloignement des points d’eau. Des femmes et des enfants parcourent quotidiennement des dizaines de kilomètres pour passer le plus clair de leur temps autour de forages tombant en panne très souvent afin de pouvoir disposer du liquide précieux. Là-bas, des abris de fortune tiennent lieu de salles de classe.
Pour tout dire, la charité musulmane sénégalaise doit pouvoir s’inscrire aussi dans la réalisation d’infrastructures économiques qui puissent impacter de façon plus significative sur le niveau de vie de leurs compatriotes qui ne sont pas, du reste, moins vaillants qu’eux.
Mais donner la charité est un fait, être charitable en est un autre

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