mercredi 7 avril 2010

existe t il encore une ecole publique senegalaise ? ( par Lorou adama GAYE )

L’école publique sénégalaise ne se porte pas bien. Elle a beaucoup perdu de son lustre d’antan... Nous assistons en direct, médusés, á sa déliquescence inéluctable. Et pourtant qu’elle nous aura valu de satisfactions, cette école publique ! C’est grâce á elle, principalement, que le Sénégal s’est toujours enorgueilli de ne posséder en fait de richesses que ses ressources humaines formées á bonne enseigne. Remarquons qu’il pouvait tout aussi se vanter d’avoir formé la quasi-totalité des élites africaines francophones d’aujourd’hui. Non seulement ses structures accueillaient des étudiants de tous horizons mais encore elle exportait gaillardement ses enseignants vers beaucoup de pays africains. Jusqu’en 1970, par exemple, l’Université de Dakar a recueilli des étudiants de nationalité française.

Qu’ils sont loin les jours de rentrée scolaire oú l’on pouvait observer une longue file de parents d’élèves cherchant á caser leur rejeton en provenance du prive ! Eh oui, on était fier d’y aller parce qu’on était convaincu de fréquenter la meilleure école possible. Elle était la plus belle émanation qui soit de notre oú se côtoyaient en parfaite osmose les petits fils de paysans, pasteurs et pêcheurs que nous étions tous, indépendamment du statut présent de nos parents.

Les plus grands commis de l’Etat, ceux qui ont marque de manière indélébile l’histoire politique du Sénégal, sont justement á chercher chez ceux-là qui ont bouclé tout leur cursus au sein de cette école. Nous pouvons citer notamment Djibo Ka, Maky Sall mais aussi le regrette Issa Mbaye Samb. Ce sont également les enseignants de cette école qui ont toujours raflé la mise aux concours d’agrégation en économie organise par le CAMES depuis sa création jusqu’en 1988, au moins.

Notre école publique va donc á vau-l’eau parce que les enseignants l’ont prise en otage et avec elle, toute la société sénégalaise, celle d’en bas en tout cas. Parce que notre école publique n’est plus que celle des enfants des badolos.

La faute á ces enseignants cupides qui brillent davantage sur le front social que sur le front scolaire. Si bien que c’est á se demander s’il existe encore une école publique sénégalaise au regard du racket honteux auquel les élèves sont soumis du préscolaire au supérieur. Depuis les cours de renforcement payants jusqu’aux polycopiés des cours du professeur á acheter obligatoirement en passant par les fais d’inscription exorbitants. Cette boulimie financière est en contradiction flagrante avec l’abnégation de nos enseignants de jadis.

La faute á ces enseignants qui ont fini d’usurper la place de leurs potaches sur le terrain des revendications puériles et immatures. Lesquels potaches se permettent dorénavant de donner des leçons de maturité á leurs enseignants en revendiquant bruyamment leur droit á l’éducation.

La faute encore á ces enseignants aux ambitions inavouées qui sacrifient l’avenir de leurs ouailles sur l’autel de la politicaillerie. Ces enseignants comme il ne faut pas qui ruinent ainsi une option stratégique fondamentale du projet de société sénégalais, la qualité de son école publique, définie par les pères de notre indépendance dont la rigueur est proverbiale.

La faute aux décideurs politiques qui se complaisent dans la facilite d’une politique de recrutement de personnel enseignant au rabais par le truchement de la contractualisation et du volontariat. Des décideurs qui ne peuvent point se départir de l’habit de complices des enseignants dans la trahison de l’école publique.

Il s’ensuit une baisse drastique du niveau des élèves. Une baisse de niveau si sensible qu’il installe un malaise très réel chez les parents d’élèves qui se tournent vers l’école privée oú leurs rejetons sont quand même assurés de disposer du quantum horaire requis.

Elle garde tout de même de beaux restes, notre école publique, comme en atteste encore son règne sans partage au concours général grâce aux vaillants élèves et enseignants du lycée Limamoulaye. Comme en témoigne la renommée toujours intacte de sa faculté de Médecine et de Pharmacie et d’Odontostomatologie, cheville ouvrière de la non moins réputée école de Médecine de Dakar, á l’origine de maintes découvertes médicales déterminantes telles que la mise en évidence du virus du sida de type vih2.
Tel un sphinx, notre école publique a donc les moyens de rebondir pour être le phare sempiternel de la nation sénégalaise. Elle doit rebondir car elle est un legs des pères de notre indépendance, de ce genre de legs que tout héritier a l’obligation morale de conserver á défaut de le faire fructifier.
En effet, **l’homme peut construire ce qu’il veut sur les principes fondamentaux de sa vie, mais il ne peut les changer ni les oublier et, si cette superstructure finit par s’effondrer, il découvre que ces éléments de base sont le seul roc auquel il doive se cramponner**

1 commentaire:

  1. Bravo, Maloum, pour cette excellente initiative de regrouper des articles "pointus" sur le fond et sur la forme, articles consacrés à votre beau pays, parfois malmené pourtant! Je me réjouis de les lire en profondeur! Et belles suites...

    RépondreSupprimer