mercredi 7 avril 2010

Amour du mensonge, Peur de la vérité ! ( par Mangoné SALL )

Peur de la vérité, amour du mensonge !

Une idée qui ne peut être traduite en paroles est une mauvaise idée. Tout comme une parole impossible à traduire en actes est définitivement mauvaise... Autrement dit, « dire ce que l’on pense » ou « croire en ce que l‘on dit » n’est pas donné à tout un chacun. Car cela relève du courage, de cette vertu infalsifiable qui prend racine justement dans son contraire : la peur. C’est bien quand on a conscience de sa peur et que l’on cherche à la domestiquer ou la surmonter qu’on fait preuve de courage.

Ne pas oser dire ce qu’on pense est ainsi une peur, donc une fuite de la vérité car l’opinion personnelle est au minimum un pion sur le damier de la Vérité. Notre sagesse populaire nous enseigne que la vérité est certes redoutée mais pas à craindre. L’enseignement à tirer de l’épique randonnée de Deug-la-vérite et Fenn-le-mensonge narrée avec succulence par le maestro Birago Diop dans les contes d’Amadou Kumba peut être invoqué. Ne dit-on pas d’ailleurs que « un mensonge accommodant vaut plus qu’une vérité blessante » ?

Ne pas croire en ce que l’on dit renvoie au fétichisme accoucheur de néologismes fort lénifiants si ce ne sont des théories grotesques et fantastiques auquel contribue considérablement la diarrhée verbale des politiciens en passe, toutefois, de devenir un championnat national. C’est là une forfaiture non moins scandaleuse que celle de la peur de la vérité. En effet, ne pas croire en ce que l’on dit est tout simplement de la tricherie, l’amour du mensonge. Car le mot est symbole de réalité ; qu’il soit faux, la réalité qu’il est censé nommer l’est tout autant. Sinon à supposer que le parleur s’invente une réalité à lui, dérisoirement factice parce que le monde n’est jamais comme ont voudrait qu’il soit. Nul ne peut se prévaloir, au seuil de sa tombe, d’avoir obtenu tout ce qu’il voulait de la vie.

Ce qui fait dire, avec amusement, en prenant exemple sur le football, que tous les sénégalais sont des sélectionneurs nationaux. Et qui explique sans doute que dés sa prise de fonction, le sélectionneur en titre se voit condamné au sursis et donc à la prudente hésitation. A-t-on peur de la vérité, en l’occurrence ?
C'est-à-dire que rien, absolument rien dans nos infrastructure, structure et superstructure sportives n’autorise la concrétisation de notre ambition ?

Dans notre société, on emploie donc de plus en plus de mots auxquels on ne croit point mais en même temps on a peur d’exprimer son opinion, de dire sa vérité sur les problèmes aux quels on est confrontés. Peur de la vérité et amour du mensonge ? Encore qu’il faille préciser : la peur n’est pas négative c’est la peur de la vérité qui l’est.
De même, l’amour est un sentiment très noble mais il est terni par le mensonge.

Un mélange tout de même détonnant, si l’on en juge !

Dont l’un des résultats les plus pathétiques se constate sur le terrain tabou du sexe corsé par la démission parentale : banalisation de l’inceste, augmentation préoccupante des meurtres conjugaux, généralisation de la débauche vestimentaire.
Par conséquent, adieu kersa, diom et mougne, vertus théologales de l‘homo senegalensis !
La pauvreté, l’extraversion et la faiblesse sont passées par là.

Et qui explique cette tendance à l’émigration massive de nos jeunes concitoyens. Une question nationale d’une telle importance qu’on a envie de s’arracher les cheveux en entendant le jeu de mots puéril auquel s’adonnent ceux qui s’essaient à son analyse.

Un mélange, enfin, si complexe qu’il explique ce silence assourdissant sur des questions vitales de l’heure qui conditionne irrémédiablement notre demain. A propos desquelles, loin de tout esprit catastrophiste, si rien n’est entrepris aujourd’hui, demain sera fatalement un éternel recommencement. Les grands et ambitieux travaux du chef de l’Etat nous indiquent la voie.

Il s’agit bien, ici et maintenant, de poser sur le tapis du débat national les questions épineuses. A cote de l’émigration massive de nos jeunes concitoyens, clandestine ou pas, celui de la filière arachidiere n’en requiert pas moins une attention soutenue.

Le Sénégal est un important producteur d’arachides, sans plus, tel que l’a voulu le colon français qui aurait, dit-on, commandité plein d’études pour en décider ainsi. Depuis au moins une dizaine d’années, qu’on en produise beaucoup ou pas assez, c’est toujours le concert de jérémiades et de plaintes inouïes.
Chaque an, en amont, on investit des dizaines de milliards que pour ce piètre résultat. Du vrai gaspillage ! Parce que la clef du problème de l’arachide est là sous nos yeux mais il est trop près - si le bout du nez est invisible n’est ce pas du au fait de sa proximité ?

Il ne s’agit pas seulement d’écarquiller bien les yeux mais encore faut il s’armer de courage pour revoir les choses et les reformer dans l’intérêt de tous.
De ce courage dont le ministre d’Etat Djibo Kâ a fait preuve en allant solliciter le saint homme de Touba de ne pas cautionner le sacrifice du secteur de l’élevage au profit de la filière moribonde de l’arachide. Le calife, quoi qu’en ont dit les esprits tordus, a bel et bien compris le sens d’une telle initiative.

Qui veut de notre arachide que nous-mêmes daubons ? N’est-elle pas seulement bonne au repas frugal du maçon ?
Faisons un petit calcul : le senegal produit 500 000tonnes d’arachides, en moyenne !
A 150 000F CFA la tonne, cela donne, en valeur, 75 milliards de F CFA.
Si tout sénégalais condescendait à consommer au moins 20 f Cfa d’arachide par jour ( en gerté thiaf, gerté bu toy, gerté saf, gerte kem, gerte sukar, en tigidege ou en diw rith ), on parviendrait à la somme de : 20f cfa x 365 jours x 10 millions de senegalais = 73 milliards de FCFA.

La SONACOS n’aura à acheter que moins de 15 000tonnes. Ce qui est loin de sa capacité théorique de trituration mais fort suffisant dès l’instant que l’huile d’arachide est hors de portée des ménages sénégalais. Ce n’est qu’une ébauche certes à parfaire mais qui autorise de lancer un appel : Alors braves sénégalais consommons de l’arachide si nous tenons réellement à nos parents paysans !

Le cas échéant, engageons nos chercheurs dans la définition de nouvelles spéculations agricole ment adaptées et économiquement porteurs pour nos paysans. Les compétences, au moins, existent.
Et puis laisser la culture de l’arachide à d’autres segments de la société qui évoluent dans des sphères autres que celui de la survie.

De la même façon, la question de l’émigration doit être posée mais en tant que phénomène de société. A ce titre, les spécialistes (sociologues, économistes et politiciens) doivent dérouler leur matériel d’analyse et leur savoir pour d’une part trouver les mots justes pour qualifier les maux en cause et élaborer des théories de sorties de la crise sociétale que nous expérimentons dans la douleur et l’ébahissement.
On émigre….à la quête du tekki… tekki se mesurant à l’aune des biens matériels bannières du fekh.

Un amalgame majeur expressif d’une personnalité biaisée (la civilisation négro-africaine étant fondamentalement spirituelle) auquel il convient de trouver le remède adéquat le plus rapidement possible tant il est vrai que ventre affamé n’a point d’oreilles !

Sans éluder la nécessité indispensable de procéder à la refonte des programmes de l’Education nationale… en vue de créer les conditions d’émergence d’une nouvelle société, celle de demain. Demain, c’est deja bientôt !

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire