vendredi 9 mai 2025

LA LUMIERE A RANIMER....

L’Ouroboros était revenu du royaume des forêts, fort secoué. Même dans ses errances les plus philosophiques, jamais il n’aurait imaginé devoir autant au gourou. Le maître des haillonneux. L’oracle silencieux des damnés. Ainsi, partout en Alkebulan, on l’attendait ; on l'avait adopté comme l'exécutant du projet du gourou auquel tous s'identifiaient à présent. On le scrutait, on le soupesait. Il incarnait désormais les aspirations inexprimables des jeunes et des vieux, des filles et des garçons, des élites et des peuples.

Ce n’était pas une charge, c’était un appel. Sa génération n’avait pas seulement hérité d’un présent glauque. Elle avait reçu une braise. Une lumière à ranimer. Il fallait oser écrire une nouvelle histoire. Non plus un récit fantasmagorique de soumission mais un sursaut libérateur de dignité. Car l’histoire ne se lit pas dans les livres des autres. Elle ne naît pas dans leurs dates ni dans leurs récits imposés. Elle pousse, comme une racine ancienne, dans les représentations, les rites, les joies, les douleurs, les silences et les luttes tues des devanciers.

Elle ne se façonne pas, non plus, sous le regard d’ailleurs en courant après les wagons construits par d'autres et certainement pas en adoptant la solution "miraculeuse" de l’intelligence artificielle. Oui, comment croire que c'est ainsi, par elle, que l’on pourrait guérir les sociétés alkébulanaises abruties, sevrées de leur mode de vie, brutalement déconnectées de leur lien au vivant ?

Dire que le monde allait changer était une lapalissade. Le monde était déjà en train de changer. Les  seules vraies questions à se poser étaient : Qu’y avait-il à gagner ? Qu’espérions-nous y gagner ? Que risquions-nous d’y perdre ?

Encore une fois, les yeux etaient suspendus aux lèvres du gourou. Cet homme étrange ni obnubilé par le pouvoir, ni avide de gloire et qui semblait posséder le don rare de transformer ses paroles d’hier en prophéties aujourd’hui réalisées. Son courage n’était pas celui des conquérants, ni des maîtres mais de celui qui savait que le vrai pouvoir résidait dans les coeurs de ses semblables transportes par ses paroles de vérité et de clarté vers l’élévation de l'âme et la transformation des consciences.

Pendant ce temps, au Gourouland, un drame se jouait.

Le Mamba noir, le larbin noir au coeur aussi noir que le charbon noir, frisait une crise d’apoplexie. Ne  venait-il pas de rabrouer, sans ménagement, la Pintade de Tangun, dont le caquetage intempestif menaçait son équilibre nerveux, et d’éconduire la Tête-d’Œuf, dont l’obséquiosité gluante avait fini par l’irriter plus que flatter son ego boursouflé.

Et pour cause, le flibustier pervers avait choisi de capituler devant le gourou ennemi, sans panache ! Un renoncement de cancrelat, comble d’ironie, qui intervenait au moment précis où il s’apprêtait à lui présenter son dernier chef-d’œuvre : un plan ourdi avec un soin pathétique, résultat de contorsions mentales aussi viles que malsaines. Tout était donc à refaire. Le plan n’était pas totalement ruiné mais le retard l'éloignait encore plus que jamais du monstre. 

Ce monstre désormais affalé sous le poids de ses intrigues vicieuses, foudroyé par la sombre révélation : sa cour n’avait jamais été qu’une foire aux malandrins. Une association de malfaiteurs, les uns, des aigrefins de première catégorie et les autres de vils courtiers. A quoi bon continuer d'entretenir sa bande d'ethnotellectuels grillés ? 

Les jababus se posaient une question simple, presque enfantine : Qu’est-ce qui, au juste, avait pu donner autant d’audace à la vilaine et cupide marmaille ? Comment avait-elle pu, dans un accès d’ignorance hypertrophiée, confondre indépendance et liberté ? 

Une dégénérescence civique ?

Aurait-elle  été influencée par l'insistance de la bêtise ou la persistance de la connerie chez la racaille ? La bêtise, oui, bestiale. Celle qui s’acharne têtue, la bêtise imbue d’elle-même, de son impunité !

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