vendredi 13 janvier 2012

ISLAM ET POLITIQUE AU SENEGAL

L’islam a toujours été évoqué pour justifier la sclérose politique des Etats arabes.
La notion de pouvoir, c’est vrai, peut être très difficile à comprendre et aussi à expliquer en islam.
C’est qu’en effet, d’une part, le pouvoir est affaire de « Mektoub » (sourate 3, verset 26) et d’autre part le prophète Mohamed (paix et salut sur lui) nous met en garde de donner le pouvoir à qui le demande !
Le printemps arabe, en cours, pose, donc, un problème crucial. 
Celui du rapport entre l’islam et la politique.
Il révèle finalement que le dogme islamique est moins en cause que les dirigeants politiques d’obédience musulmane.La religion ne serait donc qu’un amplificateur de nos qualités et réducteur de nos défauts ?
Les politiciens musulmans, généralement, ont un rapport trouble avec la religion, par rapport à leur propre foi d’une part et d’autre part par rapport aux marabouts.
Les politiciens sénégalais ne dérogent point à la règle.
Mystificateurs par rapport à leur foi, ils jouent volontiers aux opportunistes vis à vis des marabouts.
Ce qui n’est pas, entre parenthèses, pour déplaire quand on considère cet appel pressant récurrent du pied de l’Archevêque de Dakar enjoignant ses ouailles de faire de la politique !
Ainsi donc, Le Sénégal qui vit une pré-campagne électorale offre un bon terrain d’analyse.
Un bref rappel historique s’impose, quand même.
Le président Léopold Sedar Senghor, chrétien, est à l’origine de cette relation pour avoir sollicité et obtenu, le premier, le soutien des marabouts musulmans contre son rival, le Président Lamine Gueye, un musulman.
Mais il est, toutefois, totalement révolu ce temps où l’Etat laïc senghorien, à la fois fort et jaloux de sa prééminence, se permettait même de réordonner la chose religieuse en instituant les califats généraux !
Au Sénégal, l’importance de la présence du religieux, proportionnelle à son influence, dans la sphère politique s’appréhende à différents niveaux :
  • on note l’existence clairement affichée de partis et mouvements politiques animés par des marabouts qui ont la prétention de conquérir ou partager le pouvoir ou alors de monnayer leur soutien électoral. Ils font ainsi l’objet d’une cour assidue de la part des politiciens.
  • on note la proclamation accrue et sans dissimulation de leur appartenance confrérique par les politiciens. Si bien que les cérémonies religieuses brillent davantage par l’importance de la présence des politiciens…
  • on note une plus grande référence aux versets du Coran dans les discours de certains politiciens à la fois pour « descendre » un adversaire ou pour charmer la majorité de la population qui pour musulmane qu’elle soit, n’est pas aussi bien formée au fait religieux. Peu importe donc le blasphème !
La place de la religion islamique dans la politique sénégalaise ne cesse donc de s’accroitre du fait de la volonté des politiciens.
Le rapport entre la religion et le pouvoir qui en découle semble bien résulter d’une tendance masochiste car les politiciens sont devenus des obligés, des instruments des religieux.
Depuis une décennie, nous assistons, d’ailleurs, à un affaissement continu du pouvoir politique au profit du pouvoir religieux.
Quel candidat aux prochaines présidentielles osera en parler ?
Personne !
Quel Président de la République osera inverser la tendance ?
Personne !
Alors, nous voyons bien que le porte parole du calife général de Touba a bien raison de dire que si les religieux parlent, on les accuse de se mêler de la politique, s’ils se taisent, on leur demande de parler…

Lorou Adama Gaye

1 commentaire:

  1. Il s'agit vraiment là d'un sujet très difficile à comprendre pour nos esprits occidentaux que ce lien entre religion et politique... que votre article, Maloum, essaie de mettre en lumière. Merci...

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