D'où est ce que le sombre idiot ingrat, l'ouroboros, avait-il puisé sa sotte prétention à pouvoir entraver le gourou ?
Comme le monstre qui s'était perçu comme réincarnation de son belliqueux aïeul sicaire, se sentait-il à son tour réincarnation de son royal ancêtre sanguinaire ?
En toute logique, Judas, le fils de Satan, était en droit de pavoiser, l'ouroboros était en bonne voie de lui ravir la couronne du plus grand traître de Laf.
Il ne faisait pas partie de ceux qui jubilaient du sublime raid solitaire du gourou. Et pour cause, il s'était pensé en roi et projetait de saisir l'opportunité dorée à la suite de l'échec sondé et programmé du gourou pour délivrer le message de paix et de liberté aux antigourous avec comme contrepartie l'assurance d'un long règne sans anicroches.
L'air maussade d'être resté tout seul toute la journée, ses raspoutine ayant déserté, à minuit pile poil, nul n'avait été surpris de revoir l'ouroboros entamer son fameux rituel à l'intérieur de son chapelet magique. Tout à coup, il s'était retrouvé au petit matin affalé sur son derrière, incapable de se souvenir de quoi ce soit !
Concevoir l'évidence, incontenable, était une gageure pour une tête. Et cette fatuité produisait ce genre de résultat.
Comme s'il ne suffisait pas cette couardise de croire pouvoir posséder son monde par les grains d'un chapelet fut-il magique, ses grains fussent-ils en rhodium ?
Une petite voix intérieure tinta dans son oreille : Rentre dans la mêlée. Une proie esseulée est une cible parfaite. Et puis de quoi as tu peur ? Le gourou ne trichait pas et ne complotait pas.
Il secoua la tête comme un animal qui s'ébrouait et se releva en s tenant les genoux !
Les yeux étaient rivés sur les nouveaux légataires haillonneux. Jusqu'où étaient-ils prêts à aller sur la veille de l'intérêt général ?
Seraient tout aussi impavides, incorruptibles et déterminés comme leur gourou intransigeant sur le respect de ses engagements devant le peuple ?