vendredi 26 décembre 2025

JEU DU FEU ET DES OMBRES

L’ouroboros croyait semer les graines de réconciliation, mais ne voyait pousser que des plants de division. Que récolterait-il de tant d’efforts ?

Et la squaw ? Les supputations sur le sens de son périple prochoriental allaient bon train. Était-elle partie chercher absolution, force nouvelle ou exfiltration du grin de Satan ?

En ce moment de quête de transformation intérieure, les états d’âme de l’ouroboros passaient au second plan. La squaw avait rayé la fidélité de son agenda ; la dernière fois qu’elle en avait donnée, c’était au monstre, et elle s’en mordait encore les doigts… Basta, les hommes : misérables traîtres, pauvres diables, invétérés luxurieux !

Satan et le monstre etaient bien là, à coté de l’ouroboros. Rien ne soude mieux que la haine partagée !

Le monstre, sûr de son expérience, avait averti : un armistice serait le comble du malheur.

Satan, lui, ne dévoilait jamais le fond de sa pensée. Il se contentait de sa présence, les flammes gerboyant autour de sa tête, les follicules de cendres virevoltant au-dessus de ses hordes, le panache de fumée s’échappant des yeux de ses suppôts, et les tridents étincelants surplombant la progéniture.

Mais où était donc l’esprit de ruche capable de faire nation, face à l’offensive inédite des hordes démoniaques qui tarissaient les sources d’argent ? Le gourou serait-il condamné, encore et encore, à incarner seul le Gourouland ? 

Le gourou observait le pauvre hère qu’il avait pris jadis sous sa tutelle devenir un garçon pouvorien, ludopathe et prétentieux, à la tête d’une troupe de croquants et de croquantes assommés par les gâteries et les délices du pouvoir, avançant de pied ferme dans la trahison.

L’ouroboros avait choisi de faire les premiers pas vers la trahison ; l’Histoire ne faisait que l'y précipiter à grands pas.

Le ciel etait devenu subitement tout gris, l'astre solaire se cachait-il pour pleurer ? Le Gourouland retenait son souffle dans ce qui semblait etre un reflux. Le destin avait appele au grand rassemblement pour la mise sur pied d'une force de conjuration contre ceux qui attentaient à l'ordre cosmique, ceux qui jouaient avec le pouvoir. 

Le vrai jeu allait-il commencer ?

jeudi 18 décembre 2025

LES ONDES DU POUVOIR

Ce ne fut pas qu’au Gourouland que l’oscillation simiesque de l’ouroboros fit trembler cœurs et esprits. Elle avait parcouru l’Alkebulan tout entier, et bien au-delà, s’insinuant dans les consciences et maudissant cette acrobatie digne de Satan qui dénaturait l'homme.

Car l’acte politique est une onde longue. La décision passe, la signature sèche, mais la fréquence persiste, gouvernant longtemps après que les acteurs eux-mêmes l’aient oubliée. On croit décider dans l’instant ; on agit, en vérité, dans la durée, et chaque choix laisse derrière lui un sillage invisible, irrésistible, irréversible.

L’acte émotionnel, au contraire, n’est qu’une onde de choc. Instable, débordante, incontrôlable, il bouleverse les cadres établis et transforme les hommes en pions de leur propre passion. Or, ici, le lien émotionnel entre le gourou et les haillonneux surpassait toutes les hiérarchies officielles : plus fort que ce qui pouvait unir l’ouroboros à ses satrapes, plus puissant que tout décret ou commandement.

Le gourou le savait et ne s’en inquiétait nullement. Pourquoi affronter l’ouroboros, quand il suffisait de l’effleurer, de le provoquer légèrement, et de laisser l’émotion agir comme catalyseur ? Ainsi se révélait la tare longtemps cachée : l’impulsivité de l’ouroboros, cette immaturité qui se croyait courage.

Les conséquences furent dévastatrices. La squaw et les forces des ténèbres qui l’auréolaient furent englouties dans la tourmente, victimes collatérales de cette onde émotionnelle incontrôlée. L'horizon des satrapes s’étiolait : sans retenue, sans honneur, ils ne prieraient plus l’ouroboros, mais son bic, réduits à la bureaucratie et à la gestion servile.

Cependant, il y avait là une leçon que nul décret ne pourrait effacer : quand le lien vrai, l’émotion sincère, dépasse l’autorité apparente, tout pouvoir se trouve relativisé. La loyauté n’est plus un mot, elle est un acte fédérateur et un symbole de ralliement.  Malheur à ceux qui croyaient tenir le jeu par la peur ou par l’ombre d’un titre, ils découvriraient, trop tard, que leur influence n’était qu’un souffle, face à la tempête des émotions collectives.

C’est là, dans cette vérité ignorée par tant de régimes, que réside la clé du manifeste politique : gouverner n’est pas imposer, mais comprendre et canaliser les ondes, visibles et invisibles. Et surtout, reconnaître que l’émotion, lorsqu’elle est partagée et intense, est plus solide que toutes les alliances superficielles. Le gourou l’avait compris. Au tour de l’ouroboros de l'apprendre !

Ainsi, les satrapes se souviendront : la politique qui ne mesure pas la puissance des liens émotionnels est vouée à l’échec. Ceux qui croient dominer par la structure tomberont sous le poids de ce qu’ils ont ignoré. 

Et les maîtres du monde, les socles des pouvoirs, ne sont pas toujours ceux qui tiennent ou distribuent les titres, mais ceux qui savent orchestrer l’onde silencieuse qui traverse les cœurs.

lundi 15 décembre 2025

LE ZENITH LUDOPATHIQUE....

Le palace était devenu un immense jeu Lego. Place nette avait été faite pour l’expression ludomaniaque du garnement qui jouait avec les allumettes. Seulement, la facilité déconcertante avec laquelle il bâtissait et déconstruisait ses échafaudages l’avait convaincu qu’il pouvait disposer des hommes et des femmes de la même manière. Y compris des faits passés au Gourouland !

Le capitaine immature aimait tripoter les manettes du moteur de la pirogue ? Qu’à cela ne tienne : les forces réactionnaires alkebulanaises, si farouchement antagonistes au gourou, lui avaient façonné un joujou parfaitement adapté pour hypertrophier son ego, écho lointain d’un paganisme ancestral.

Ludomanie égalait-elle folie ?
À question alambiquée, réponse ambiguë.
Pourtant, il restait certain que la manière de tanner le cuir révélait le degré d’honneur des personnages en jeu.

Était-ce à dire que les forces des ténèbres avaient parachevé leur emprise sur l’Ouroboros ? Cette interrogation contrastait avec la récente circonspection affichée par Imeldasse et sa mère, la Tisseuse.

Il y avait pourtant un bémol, signe d’un éclair ou d’un reste de lucidité chez l’Ouroboros. Il distribuait publiquement, en veux-tu en voilà, des preuves de son attachement au parasol que représentait le gourou pour lui, tout en réservant en privé ses prières de malédiction, exutoire cruel d’une rage née d’avoir vainement cherché une doublure parmi ses infâmes doungourous capable de l’épaissir autant, sinon davantage.

Ailleurs, pour ressusciter, l’ancien monstre n’avait eu d’autre solution que de vendre son âme au Diable. Sans renâcler.

Peut-être qu’ainsi, dans l’antre de Satan, il pourrait affronter la squaw à armes relativement égales. Oh, il n’ambitionnait pas de contre-peser dans le cœur du Diable l’attraction magnétique de la squaw. Il espérait simplement se lier d’amitié avec quelques-uns de la satanée progéniture. Tant mieux, si cela pouvait être une fille.