mardi 21 décembre 2010

LE MONDE MACHIAVELIQUE DE LA POLITIQUE SENEGALAISE

La divulgation des télégrammes diplomatiques américains sur le site internet Wikileaks n’a pas, apparemment, épargné grand monde. Il reste qu’il est toujours difficile de qualifier ce genre de scoops, surtout provenant des Etats-Unis. Une fuite organisée ou un ballon de sonde ? Qui sait ? Qui saura ?

L’histoire de notre monde contemporain est riche d’événements qui nous enseignent, en effet, jusqu’où les américains peuvent aller pour défendre leur statut de gendarme du monde – qu’ils perçoivent comme un rôle malheureusement - qui les autorise à tout et auquel ils tiennent comme à la prunelle de leurs yeux.

Des événements qui font désordre toutefois au regards de leur puritanisme affiché et leur attachement à la démocratie. Et pourtant…
C’est oublier que la ségrégation raciale n’y a connu de fin que vers la fin des années 60.
C’est oublier ses expériences médicales macabres sur les populations guatémaltèques et sans aucun doute d’ailleurs.
C’est oublier les paysans vietnamiens brulés atrocement au napalm.
C’est oublier le complot odieux, suivi de son lâche assassinat, contre le Président Saddam Hussein.
C’est oublier que les Etats Unis ont été le pays d’asile de maints bourreaux nazis, etc…

Mais, il faut tout de même reconnaitre que ces jugements émanant de ces diplomates ressortissants mélomanes du pays le plus égocentrique du monde sont remarquables dans la mesure où nonobstant « qu’aussi grands que sont les rois, ils ne sont que nous sommes », il est toujours intéressant d’avoir une idée sur la perception des autres sur nous, le reflet que renvoie son image dans l’esprit de l’autre. Et c’est pourquoi une lecture suivie des télégrammes américains s’impose à nous.

Le continent africain a eu, on s’en doute bien, sa part des révélations, quand bien même il faille déplorer qu’elles exhalent des relents d’un complexe de supériorité de mauvais aloi en versant dans la caricature dévalorisante et désobligeante de ses inénarrables princes.


Le Sénégal n’est pas en reste. Les jugements sont très durs ; le diagnostic est sans complaisance, 
les prédictions tout aussi pessimistes et pour cause !

Démocratie faiblissante gangrenée par la corruption, le Sénégal est sous la coupe réglée d’un landernau politique sénégalais qualifié de monde machiavélique. Une élite politique qui se morfond dans la peau d’une bourgeoisie d’accaparement.
Il appert que notre pays est pris en otage (étau, ne semble-t-il pas plus correct ?) entre le marteau d’un pouvoir essentiellement familial (mère, père, fils et fille, neveux et nièces, petits-fils et petites-filles) et ses larbins d’une part et d’autre part, l’enclume d’une opposition égoïste et excessive, fourbissant ses canines en prévision de la très probable future curée.

La raison en est que le Sénégal est le pays où la politique se revendique comme une profession qui assure des revenus confortables que laissent entrevoir le train de vie fort enviable de la politicaillerie sénégalaise particulièrement oisive et frivole.
La politique, en outre, s’y décline comme le plus sûr moyen, en l’état actuel des choses, de gravir les escaliers de la réussite sociale. En atteste que tous les politiciens sénégalais roulent sur l’or cependant qu’on ne leur connait aucune qualification ou emploi où ils aient pu se réaliser.

C’est sous cet éclairage que l’avertissement américain prend tout son sens : le décès du Président Wade en cours de mandant (une éventualité qui entre dans l’ordre naturel des choses) sans qu’il ait auparavant désigné son successeur (une absurdité démocratique), inaugurerait un cycle d’instabilité politique au Sénégal en tant que challenge que le ‘’monde machiavélique de la politique sénégalaise’’ (sic) n’a pas la capacité de surmonter.

C’est aussi un terrible aveu. Apres Wade, c’est bien le désert !

Un aveu qui interpelle en premier lieu les amis du Sénégal car je ne vois pas vraiment ce dont le bétail électoral sénégalais dispose pour contrer cette triste réalité. Si bien que ce sont les amis du Sénégal et les institutions internationales qui sont interpellées au premier plan. Parce qu’il s’agit tout simplement d’éliminer toute cette racaille de la course au fauteuil présidentiel. Elle est la principale responsable de l'arrieration de l'Afrque.Rien ne sert de jouer au médecin après la mort si tant il est vrai que le développement du Sénégal les préoccupe, s’il est bien évident qu’il n’y a pas de collusion d’intérêt… C’est le seul combat honorable pour la société civile et les nombreux mouvements politiques.

Issa Cissokho
cilpdak@yahoo.fr

vendredi 3 décembre 2010

A LA FONTAINE DE L'ADVERSITE

Le conseiller en communication de Monsieur Karim Wade, Monsieur Cheikh Diallo pour le nommer, a trouvé une belle métaphore en qualifiant Idrissa Seck de ‘’Djibo Ka’’ de Abdoulaye Wade. Autrement dit, Idrissa Seck est (ou risque d’être ?) au président Wade ce que Djibo Ka restera à jamais pour le président Diouf.

Une connexion virtuelle (pour emprunter le vocabulaire prisé de Mr Seck) est vite subodorée entre les personnalités des sieurs Ka et Seck quand bien même il apparait plus sage de formuler cette idée sous forme de question pour tenter d’y répondre…

Mais parce que chacun de nous est unique sur terre, voilà pourquoi il y aura toujours plus d’éléments qui les différencient que de points qui leur sont communs quand bien même on retrouvera des similitudes troublantes dans leurs parcours ou leur caractère intrinsèque ou encore dans les jugements dont ils font l’objet…

Que l’on en juge ! Mais juger n’est ce pas comparer, peser ou mesurer ? Exercice difficile que nous nous évertuerons à mener en faisant la part des choses.

Qu’on le veuille ou pas, ce sont deux authentiques politiciens, au fameux pedigree, froids calculateurs, courageux et rusés, sûrs d’eux et même trop sûrs d’eux ; qu’on les aime ou pas, ils ne laissent personne indifférents si bien qu’ils ne se retrouvent à l’aise que dans les extrêmes, entre ceux qui les aiment à la folie ou les haïssent à mort. C’est qu’en tant que faiseurs de rois et tombeurs de rois, tout à la fois, ils ont conquis de haute lutte leur place dans l’arène politique sénégalaise, dans l’histoire politique du Sénégal indépendant, tout court.

Mais force est de reconnaitre qu’ils ont été à bonne école ; l’un chez Senghor à la rigueur proverbiale puis chez Abdou Diouf au flegme déroutant, l’autre chez Abdoulaye Wade, une maestro virevoltant de la politique. Comme quoi, on a toujours besoin d’un maitre pour tout.

Que leurs noms soient gravés en lettres de feu, de sang ou d’or, n’est pas le plus important, convenons-en ; l’essentiel est que chacun d’eux à un moment de sa vie a su faire preuve de courage que l’on peut qualifier d’insolent et en buvant cette eau chaude de la fontaine de l’adversité, jouer le rôle de pionnier pour s’incarner dans la peau d’un phénomène politique pour conquérir la confiance d’un grand nombre de Sénégalais qui lui ont témoigné leur foi et confié leurs espoirs. Chacun d’eux a, à sa façon, contribué à faire avancer incontestablement les choses dans le domaine politique. Ils en sont arrivés à un point où ils ne convainquent plus par leurs idées, on les admire ou on les craint, c’est tout !

Idrissa Seck fut le premier politicien sénégalais à oser porter la contradiction à un chef de parti, dans son parti même. Après cet incident tout récent du dernier comité directeur du PDS, nul doute que beaucoup de choses vont désormais changer dans tous les partis. Auparavant, dans une rebuffade salutaire, faisant bon cœur contre mauvaise fortune, il a dû puiser au plus profond de lui – cela veut tout dire - pour rabattre le caquet à tous ses détracteurs, confondre ses accusateurs et s’extirper d’une très mauvaise passe politique. Il crée tour à tour son parti et se présente à l’élection présidentielle contre Wade. Une première, encore et l’on estime qu’il s’en est fallu de peu pour qu’il ne mette en ballottage ce dernier… avant de revenir dans le parti dans le giron de son mentor… pour lui porter l’estocade finale ?

Alors que, jusqu’ici, la sortie du gouvernement était synonyme de mort politique et la démission du parti au pouvoir considérée comme un suicide, Djibo Ka fut le premier politicien sénégalais à refuser de se laisser mourir. Il met sur pied le courant du renouveau dont il demande la reconnaissance par son parti. Des intellectuels honnêtes, des citoyens de toute obédience, convergent vers lui et un club, ressources et prospectives, sans doute la plus charmante expérience intellectuelle contemporaine, voit le jour. De fil en aiguille, Djibo Ka démissionne de son parti – sur le conseil avisé d’un aîné, Jean Paul Dias - pour pouvoir concourir au suffrage de ses compatriotes. Des partis politiques légalement constitués, le Jeff-Jel et l’USD, mères-porteuses avant la lettre, portent sa candidature. Il est triomphalement élu député du peuple sénégalais et son parti d’origine, pour la première fois dans son histoire, perd la majorité relative du corps électoral. La fonction de député acquiert ainsi une seconde noblesse après, pour l’anecdote, la première dont il fut encore l’artisan en appelant systématiquement les députés par le titre d’’’Honorable’’.

Il semblerait en effet, pour une fois, que la nature n’a pas bien fait les choses. En effet qui se ressemble s’assemble, dit-on, mais dans le cas d’espèce, Djibo Ka et Idrissa Seck qui se ressemblent comme deux gouttes d’eau du point de vue de la petite taille se vouent une haine tenace. Une haine qu’il serait bienvenu de soumettre aux psychiatres tellement elle en est venue à déborder le cadre de la normalité… A l’un et à l’autre, la réalité renverrait-elle une image de soi si négative à ce point qu’il faille la combattre si violemment ? La haine, en tout état de cause, est une pathologie qui ne trouve de terreau fertile à son essor que dans l’ivraie.

Mais la similitude entre les deux ne s’arrêtent pas seulement là. Ils partagent en commun d’être arrivés au pouvoir pratiquement par le haut, au même poste qu’ils ont occupé pendant le même nombre d’années.

Djibo Ka fut le dernier directeur de cabinet du président Senghor et Idrissa Seck, le premier du tout nouveau président Abdoulaye Wade...pendant trois ans avec le même bonheur de bénéficier sans l’ombre d’un doute de la confiance totale de leur mentor.

Idrissa Seck a été une pièce maitresse dans l’arrivée d'Abdoulaye Wade au pouvoir tout comme Djibo Ka le fut pour l’intronisation de Abdou Diouf en apportant son aide décisive dans les manœuvres de haute voltige au sommet de l’Etat pour la mise en orbite de ce dernier dans le schéma de succession du président Senghor.

Une nuance tout de même et de taille ! A ce poste, Idrissa Seck manipulait l’argent de la caisse noire, au contraire d’un Djibo Ka dont l’attention était plutôt attirée par la matière administrative. Ce qui dénote une divergence stratégique dans la conquête du pouvoir ou tout simplement dans le domaine de l’ambition politicienne nourrie par l’âge.

Djibo Ka est devenu directeur de cabinet à l’âge de 30 ans et Idrissa Seck à l’âge de 40 ans.

Ces options différentes expliquent pourquoi Djibo Ka est devenu ce monstre de l’efficacité administrative que tous lui reconnaissent et Idrissa seck ne brille que par des objets de nouveau riche qu’il étale plein la vue.

Toujours est-il qu'Idrissa Seck, sitôt son mentor en place, s’est empressé de mettre en branle son bagout pour se constituer un patrimoine financier à la mesure de sa prédestinée présidentielle qu’il s’est confectionnée et clame haut et partout. 
Il y parvint par le biais du plus splendide et rapide enrichissement de l’histoire humaine. Songez qu’en quatre ans, sans industrie et sans héritage, un homme croulant sous des dettes se retrouve à la tête d’une fortune si colossale qu’elle lui permet de se payer un immeuble dans l’un des quartiers, le 7eme arrondissement, les plus huppés de Paris-la-France ! 
Sans doute qu’il a été instruit par le cas de la descente aux enfers de Djibo Ka à qui on a coupé le salaire pour lui infliger la pire des souffrances, celle de la pauvreté.

Alors que Djibo Ka, lui, adoptait un profil bas, mélange de loyauté et de zèle prosélyte, pour enraciner le nouveau pouvoir de son mentor. Sans doute trop naïvement, rétrospectivement. Il y parvint mais son zèle eut pour conséquence qu’il se mit à dos tout et tous, y compris son ancien mentor Léopold Sedar Senghor.

Ils ont, en outre, le même péché mignon. Ils sont nostalgiques ! Ce qui leur vaut leurs déboires actuels imputables à de l’incompréhension que l’opinion témoigne par rapport à leur comportement. Eh oui, autant le petit peuple les a supportés dans leur fronde, autant il les a rejetés au moment de leur retour au bercail. Car ce tempérament s’accorde mal avec une logique d’action et de comportement acceptables du point de vue du bon sens…

Djibo Ka ne s’est résolu à regimber que quand il fut évident pour lui qu’on lui préférait un autre à propos duquel il a toujours nourri un complexe de supériorité. Que le mentor revienne par la suite lui demander de revenir à ses côtés « conduire les changements » entre les deux tours de l’élection présidentielle de 2000, le voilà qui oublie toute prudence élémentaire, toute logique intellectuelle pour revenir dans la maison du père. Une erreur ou une inconséquence qu’il paiera sans doute jusqu’à la fin de ses jours politiques, sauf extraordinaire.

Idrissa Seck, premier ministre, est un homme pressé qui ne cache plus ses ambitions de succéder au pape du Sopi qui sans doute lui a confié beaucoup trop de pouvoir. Ivresse des cimes, quand tu nous tiens ! Obnubilé par son sombre dessein (toute conquête de pouvoir est suspecte, en effet), il accumule de somptueuses maladresses dans le déroulement de sa feuille de route… Il est sévèrement livré à la curée. Avec une violence inouïe, il est accusé de tous les péchés d’Israël, malmené et embastillé au point qu’il échappe de peu à la folie selon des sources pénitentiaires dignes de foi. Grâce à son esprit rusé, au fond celui d’un ‘’adulte mal grandi’’ qui pense que le monde est un jeu d’échecs ou de toucher-coulé, il parvient à retourner la situation à son avantage... pour entreprendre de regagner sa place auprès du père… au mépris de toute considération logique comme il en fut avec son sosie politique et comme qui, il devra trainer comme un boulet sa tortuosité.

Comme quoi l’agilité de la langue peut nous mettre dans des situations desquelles l’agilité des pieds ne peut guère nous extirper. Mais il ne faut guère vendre la peau de ces deux acolytes avant de les avoir tués. Ils ont suffisamment montré que Dame Nature les avait assez dotés de ressources. 

Nous prions Dieu de nous éclairer car ils partagent, enfin, la volonté d’être le quatrième président de la République, donc de nous diriger !

Ababacar Sedikh DIOUF
cilpdak@yahoo.fr